Aller au contenu
Chargement...
Espace conférencier

Parti s’installer aux Etats-Unis à l’âge de 17 ans pour y suivre des études de communication et de cinématographie, Eric Brun-Sanglard côtoie un temps le milieu du cinéma à Los Angeles avant de travailler auprès de grands photographes américains, ce qui le conduira à prendre la direction artistique d’une agence de publicité spécialisée dans le parfum.

A l’aube de ses 34 ans, il perd la vue mais se lance dans une seconde carrière, l’architecture d’intérieur, forçant ainsi les portes d’une destinée dont il était à priori exclu. Pionnier du design sensoriel, il compte Pénélope Cruz, Francis Ford Coppola ou encore Germaine Jackson parmi ses clients…

En contant ses expériences, Eric Brun-Sanglard nous éclaire sur les capacités insoupçonnées de l’être humain et partage, avec bienveillance, sa vision du bonheur. A travers sa « leçon » de résilience, il nous invite à accueillir à notre tour le bonheur à bras ouverts.

Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?

B-S. : Le 5 juillet 1994, je souffrais d’un problème à l’œil droit. Quelques mois plus tard, je perdais l’usage de mes deux yeux. Un virus avait détaché ma rétine et complètement détruit mes nerfs optiques. Mon médecin ne me donnait guère de temps à vivre. A cette époque, j’avais entamé de grands travaux de rénovation dans ma maison à Los Angeles. Ayant dû abandonner mon emploi, j’ai décidé d’achever le chantier de ma maison et de la revendre pour pouvoir survivre financièrement. Je me suis alors ré-approprié mon espace grâce à mes autres sens et j’ai créé un environnement émotionnellement rassurant. Les bruits, les odeurs, l’énergie des couleurs ou encore la sensation du soleil sur ma peau sont devenus mes points cardinaux, mes points de repère. Les gens qui visitaient ma maison me confiaient qu’ils s’y sentaient bien. Le monde du visuel disparaissait ainsi au profit d’une véritable expérience sensorielle.

Après le succès de cette première vente, j’ai décidé de me lancer dans une nouvelle aventure en utilisant ce que j’appelle aujourd’hui le « design sensoriel ». Je continuais à racheter des maisons en mauvais état et je leur donnais « une âme positive » avant de les revendre. Après une mauvaise association avec un entrepreneur qui, profitant de ma cécité et abusant de ma confiance, avait détourné tous mes biens à son profit au point que j’ai dû fermer la société que j’avais créée et revendre ma maison pour rembourser mes créanciers, j’ai cherché un moyen de remonter la pente. J’ai décidé de partager mon expérience de « designer aveugle » [j’étais déjà connu sous le nom de « Eric B. the blind designer »] sur une grande chaîne de télévision américaine à laquelle j’ai proposé un concept d’émission de décoration d’intérieur, « Designer  Blind ». Après une saison réussie, j’ai toutefois dû arrêter l’émission à cause d’un problème de santé, avec le sentiment de tout perdre à nouveau. 

Après avoir subi une greffe de rein, j’ai décidé de rentrer en France pour renouer avec ma famille et retrouver mes racines que j’avais délaissées pendant trente ans. Un éditeur français m’avait, en outre, contacté pour écrire un livre et des maisons de production pour faire des émissions de télévision. C’est comme si mon pays me rappelait avec de belles opportunités pour partager toutes ces leçons de vie.  Mon livre « Au-delà de ma nuit : Témoignage d’un designer aveugle » fut publié en 2010 et j’ai animé une émission de décoration sur la chaîne Téva avec Sandrine Dominguez. Je pense sincèrement que la vie nous offre de meilleures perspectives que ce que l’on imagine.

.

Votre cécité vous a-t-elle conduit à vous fier davantage à votre intuition ? Nos capacités intuitives sont-elles réellement sans limites ?

B-S. : Lorsque j’ai perdu la vue, j’ai été contraint de trouver de nouvelles solutions, d’apprendre à me laisser guider par mon intuition, mes instincts, les énergies et bien sûr… faire confiance aux personnes autour de moi. On a continuellement tendance à se mettre des barrières mais notre intuition n’a pas de limite. Notre corps n’est pas programmé comme on pourrait le penser : si on choisit d’apprendre de nos challenges et de défier la vie, on découvre une résilience incroyable et un nouveau monde plein de belles surprises.

Dans la vie, il n’y a pas de défaite, mais seulement des leçons qui nous donnent l’opportunité de mieux avancer…il suffit de le décider, de le voir comme tel.

.

D’ailleurs, pensez-vous que nous sommes trop influencés par ce que l’on voit ?

B-S. : Oui. Je trouve que l’on a même atrophié nos sens primaires au profit de la vue. Rappelez-vous que les bébés entendent, sentent, touchent et goûtent avant de voir. On a érigé la vue comme repère essentiel alors qu’elle se construit et s’affine grâce à nos autres sens. Paradoxalement, je remarque que les gens s’ignorent et s’éloignent davantage chaque jour. On le constate aisément avec les réseaux sociaux. Le culte de l’apparence, amplifié par les nouveaux moyens de communication, conditionne largement le degré de confiance en soi, particulièrement quand on est jeune. Il faut cesser de tout ramener à ce que l’on voit, réapprendre à écouter et ressentir ce que notre corps nous dit. D’ailleurs, je rêve d’un lieu où je pourrais organiser des rencontres et échanger avec toutes sortes de personnes, des amis, des artistes à travers des collaborations telles que la philosophie, la musique, l’art, la gastronomie, l’écriture, une nouvelle forme de communication… et d’échanges.

eric brun-sanglard

Lors de vos interventions, vous expliquez comment vivre en harmonie avec son environnement. Comment y parvient-on ?

B-S. : Tout au long de notre vie, on rencontre des personnes avec lesquelles le courant passe, presque instinctivement, et d’autres pour lesquelles on ne ressent aucune énergie positive. Comme j’aime le dire, il y a des relations pour une raison, pour une saison ou pour la vie. Ce mécanisme psychique s’adapte également à la perception des énergies. Certaines notes se marient à merveille et d’autres moins. Il faut alors fermer les yeux et identifier ces dissonances pour mettre en valeur le reste, doser et créer une parfaite harmonie avec son environnement.

.

Comment êtes-vous parvenu à faire de votre « handicap » une force ?

B-S. : Lorsque j’ai perdu la vue, j’ai accepté de découvrir un monde différent. A l’époque, je ne savais pas encore comment j’allais y parvenir mais j’ai décidé de redécouvrir mon environnement à travers mes autres sens. J’ai ainsi affiné mon ouïe en m’initiant au piano et développé mon toucher en faisant de la sculpture. L’olfactif était déjà bien développé grâce à mon ancienne carrière de publicitaire dans le monde du parfum et malgré ma cécité, j’ai appris à « voir » à travers mes autres sens. De même, j’écoute davantage mon corps car il sait ce qui est bon pour moi. Lorsqu’il est saturé par trop de bruit, j’ai découvert la capacité de faire le vide tout en restant présent dans un milieu sonore chaotique. Notre corps dispose d’une extraordinaire capacité de résilience. Finalement, ce sont peut-être les personnes voyantes qui sont handicapées : quand je rencontre quelqu’un, rien de visuel ne me distrait, je vais directement au plus profond de la personne, je la ressens vraiment… Et puis, au niveau pratique, ma situation n’a pas que des inconvénients ! Faire mes bagages, le ménage ou la cuisine la nuit, dans le noir complet, n’est plus un problème pour moi. Je fais des économies d’électricité et du coup, je pollue moins la planète (dit-il en riant). 

.

D’après vous… le bonheur est-il inné ou acquis ?

B-S. : Le bonheur n’est pas inné. C’est un choix mais aussi une attitude et un aboutissement. Dès lors, je ne pense pas que l’on puisse atteindre un état de plénitude profond, stable et durable à travers des plaisirs et des gratifications éphémères. Pour moi, le bonheur est une notion plus subtile. Je le définis comme une sensation de sérénité et de paix intérieure.

Vous avez exercé de nombreuses professions au cours de votre carrière. Pouvez-vous nous parler de vos activités du moment ?

B-S. : Je consacre la majorité de mon temps à mon activité de conférencier. J’ai notamment été sollicité à trois reprises par les organisateurs de TEDX pour donner des conférences à Paris, à Belfort et en Alsace où j’ai pu partager sur des sujets forts. J’apprécie quand le format des conférences me permet de transmettre un message et d’inspirer mon auditoire à fermer les yeux, affronter et dépasser ses peurs. J’interviens également dans des écoles pour sensibiliser les futurs architectes au design sensoriel et les inciter à appréhender les lieux avec leurs autres sens. Pour moi, le design est constitué à 99% de ce que l’on perçoit et à 1% de ce que l’on voit.

Pourquoi aimez-vous travailler avec Brand and Celebrités ?

B-S. : Brand and Celebrities m’accompagne régulièrement dans le cadre de mes conférences en France et à l’étranger. La plateforme en ligne de Brand and Celebrities est pratique et les relations que j’ai nouées avec ses experts sont entremêlées d’énergies positives et professionnelles. Pour moi, les rencontres et les relations humaines sont très importantes. La curiosité et le goût de l’intelligence me donnent énormément de force. Tout me me passionne et je pense honnêtement que tout le monde a quelque chose à m’apprendre…